02 - Logiques de programmes : quand la machine raisonne sur ses logiciels

Xavier LeroyCollège de FranceScience du logicielAnnée 2020-2021Logiques de programmes : quand la machine raisonne sur ses logicielsLe deuxième cours a été consacré à l'étude approfondie des « logiques de Hoare », c'est-à-dire des logiques de programmes qui suivent l'approche introduite par C. A. R. Hoare en 1969. Nous avons défini une telle logique de programmes pour le langage IMP, un petit langage impératif à contrôle structuré que nous avions déjà étudié dans le cours 2019-2020 « Sémantiques mécanisées ». Nous avons ensuite développé diverses extensions de cette logique : règles de raisonnement dérivées ou admissibles, non-déterminisme, erreurs dynamiques, contrôle non structuré, etc.La suite du cours a étudié les liens entre la logique de programmes et la sémantique opérationnelle du langage IMP. Nous avons défini et démontré la correction sémantique de la logique : toutes les propriétés d'un programme dérivables par les règles de la logique sont bien vérifiées par toutes les exécutions concrètes du programme. Plusieurs techniques de démonstration ont été esquissées : inductives, co-inductives, ou encore par comptage de pas (step-indexing).La complétude est la propriété réciproque de la correction sémantique : toute propriété vraie de toutes les exécutions d'un programme peut-elle s'exprimer comme un triplet de Hoare et se dériver par règles de la logique ? Une logique complète permettrait de décider le problème de l'arrêt. La complétude absolue est donc impossible pour un langage Turing-complet. En revanche, la logique de Hoare satisfait une propriété de complétude relative montrant qu'elle est aussi expressive qu'un raisonnement direct sur les exécutions des programmes, à logique ambiante fixée.Enfin, nous avons discuté des possibilités d'automatiser une vérification déductive à base de logique de Hoare. À condition de fournir manuellement les invariants des boucles, un calcul de plus faible précondition, ou de plus forte postcondition, permet de réduire la vérification d'un programme en logique de Hoare à la vérification d'un ensemble d'implications en logique du premier ordre, tâche qui peut être confiée à des démonstrateurs automatiques ou assistés.

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Écrire un petit programme informatique est facile. Concevoir et réaliser un logiciel complet qui soit fiable, pérenne et résistant aux attaques reste extraordinairement difficile. C'est le but des sciences du logiciel que de concevoir et développer les principes, les formalismes mathématiques, les techniques empiriques et les outils informatiques nécessaires pour concevoir, programmer et vérifier des logiciels fiables et sécurisés.L'enseignement de la chaire Sciences du logiciel vise à explorer cette problématique et à présenter la recherche contemporaine dans ce domaine. Le cours privilégie les approches dites « formelles », par opposition à l'empirisme souvent de mise en génie logiciel. Ces approches s'appuient sur des fondements mathématiquement rigoureux, connus ou en émergence : sémantiques formelles, logiques de programmes, systèmes déductifs, équivalences de programmes, calculs de processus… Historiquement, ces concepts ont émergé de considérations de programmation très terre-à-terre avant de se parer de rigueur mathématique. Le cours s'efforce de retracer ce cheminement des idées en partant de l'intuition du programmeur et en allant jusqu'à la mécanisation de ces approches formelles.Les premières années de cet enseignement auraient pu s'intituler « Programmer, démontrer », car ils ont exploré plusieurs modes d'interaction entre la programmation de logiciels et la démonstration d'énoncés mathématiques : programmer puis démontrer, comme dans les logiques de programmes pour la vérification déductive ; programmer pour démontrer, comme dans les logiques constructives et l'assistant à la démonstration Coq ; enfin, programmer égale démontrer, comme dans la féconde correspondance de Curry-Howard, objet de la première année du cours.La recherche de la chaire Sciences du logiciel s'effectue dans le cadre de l'équipe-projet Cambium, commune avec l'Inria. Les travaux de l'équipe visent à améliorer la fiabilité, la sûreté et la sécurité du logiciel en faisant progresser les langages de programmation et les méthodes de vérification formelle de programmes. Les principaux thèmes de recherche sont les systèmes de types et les algorithmes d'inférence de types, la vérification déductive de programmes, le parallélisme à mémoire partagée, et les modèles mémoires faiblement cohérents. L'équipe conçoit et développe deux grands logiciels de recherche qui intègrent et font passer dans la pratique bon nombre de ses résultats : OCaml, un langage de programmation fonctionnel statiquement typé et son implémentation, et CompCert, un compilateur formellement vérifié pour logiciels embarqués critiques.